« On ne peut pas comprendre tant qu’on ne l’a pas vécu, tant qu’on n’a pas eu les pieds dans l’eau qu’on n’entend pas le silence » Lawrence Pruvost, maraîchère, s’en souvient comme si c’était hier. Ce 4 janvier 2024, des pluies d’une intensité exceptionnelle s’abattent sur le Pas-de-Calais et provoquent des inondations records. Son exploitation agricole à La Calotterie, à une quarantaine de kilomètres du Touquet, est en première ligne. Les serres sont hors d’usage, les récoltes noyées. En quelques heures, le travail de toute une année est anéanti. Un champ de désolation se déploie sous ses yeux.
Il faudra plusieurs semaines pour que cette eau s’évacue et des mois pour tout reconstruire. « Ça a été dur, rien qu’en voyant les images, j’ai la voix qui en tremble, (…) vous avez une étendue d’eau devant vous, vous ne reconnaissez plus rien et vous vous dites : qu’est-ce que je vais faire ? Je n’ai plus de boulot, je n’ai plus rien ! ».
Endettés pour remettre sur pied leur exploitation
Lawrence et son mari ne peuvent plus compter sur la vente de leurs légumes pour faire face aux charges qui pèsent sur l’exploitation. Réduits à ne percevoir que le RSA pendant cette période terrible, le couple n’a pas d’autre solution que de s’endetter pour essayer de remettre sur pied son activité. L’exploitation et Lawrence Pruvost se relèvent doucement mais de nombreuses questions demeurent.
« Pourquoi rien n’a été fait alors que le résultat d’une étude publiée quelques années plus tôt alertait sur le risque de montée des eaux ? » interroge-t-elle sur le plateau de Dialogue Citoyen. Ronan Dantec, sénateur écologiste de Loire-Atlantique confirme l’existence de cette étude publiée dès les années 2020 et regrette qu’aucune mesure n’ait été prise pour éviter le pire, malgré les alertes de l’Agence de l’eau. Il ajoute que malheureusement, face à ce problème complexe, il n’existe pas de solution miracle.
« Il faut nous aider nous les agriculteurs ! »
« Les Anciens entretenaient les fossés pour éviter les inondations, ils avaient le droit, maintenant il faut demander l’autorisation à la police de l’eau » rappelle la maraîchère sur le plateau de Quentin Calmet. Jean-Yves Roux sénateur RDSE des Alpes-de-Haute-Provence lui répond et évoque les différentes options testées ces dernières années pour lutter contre les crues. Il pointe aussi du doigt un cruel manque d’anticipation et plus encore, la lenteur et les lourdeurs administratives.
Lawrence lance enfin un cri d’alerte aux sénateurs présents dans l’émission : « Il faut nous aider nous les agriculteurs ! » Christine Lavarde sénatrice LR des Hauts-de-Seine reconnaît la spécificité des métiers de l’agriculture face à de telles catastrophes et la complexité du régime d’indemnisations : Cette profession particulière est la moins bien couverte par le régime assuranciel.
Il faut le rappeler, on ne déménage pas une exploitation agricole, comme on déménage une maison.