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Budget 2025 : l’accès aux documents préparatoires refusé à la commission des finances de l’Assemblée nationale

Nouveau rebondissement dans le chemin tortueux du budget 2025, devenu un véritable parcours du combattant pour les parlementaires. Les deux plus hauts responsables de la commission des finances de l’Assemblée nationale sont ressortis les mains vides de leur contrôle sur pièces et sur place à Matignon, une quarantaine de minutes après leur arrivée en début d’après-midi ce 17 septembre.

Le président (LFI) de la commission, Éric Coquerel, et le rapporteur général du budget, Charles de Courson (Liot), s’étaient rendus rue de Varenne dans l’objectif de consulter les lettres-plafonds, à savoir les montants des crédits des ministères fixés par le gouvernement démissionnaire pour l’année 2025. Ils avaient fixé un ultimatum au Premier ministre : sans communication de ces documents, ils iraient les chercher eux-mêmes. Les députés ont été reçus par le chef de cabinet de Michel Barnier, Baptiste Rolland, et la secrétaire générale du gouvernement, Claire Landais.

« On est assez sidérés »

« On est assez sidérés, Charles de Courson et moi-même, parce qu’on nous a refusé la consultation de ces documents, dont je rappelle que c’est un droit constitutionnel qui est octroyé au président de la commission des finances et au rapporteur général du budget », s’est exclamé Éric Coquerel, devant la presse. « La raison pour laquelle on nous les refuse, c’est de nous expliquer que ces documents doivent être considérés comme des documents préparatoires à la décision budgétaire », a ajouté le député de Seine-Saint-Denis, qui se dit « en colère ».

Ces lettres-plafonds reproduisent à l’euro près pour 2025 les crédits votés en 2024 (492 milliards d’euros), ce qui constituerait une dizaine de milliards d’euros, le montant n’étant pas indexé sur l’inflation.

La veille, le Premier ministre Michel Barnier précisait aux deux députés, ainsi qu’à leurs homologues du Sénat, que le budget 2025 serait « construit sur la base des lettres-plafonds », tout en se réservant le droit de l’amender. Les lettres-plafonds doivent donc être « considérées comme des documents budgétaires décisionnels », selon Éric Coquerel.

Les deux parlementaires y voient une atteinte grave aux prérogatives des assemblées. « On ne peut pas lâcher sur des droits constitutionnels du Parlement. La secrétaire générale du gouvernement nous a parlé de la séparation des pouvoirs. Ce n’est pas refuser au pouvoir législatif les moyens d’exercer son pouvoir », s’est également insurgé Charles de Courson, face à l’hôtel de Matignon.

« Tous les renseignements et documents d’ordre financier […] doivent leur être fournis », selon la loi

La loi relative aux finances publiques (LOLF) ne souffre en effet d’aucune ambiguïté. Son article 57 dispose que « tous les renseignements et documents d’ordre financier et administratif » que les présidents des commissions des finances et leurs rapporteurs généraux demandent « doivent leur être fournis », exception faite « des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l’Etat et du respect du secret de l’instruction et du secret médical ».

« C’est un déni de plus des droits du Parlement, c’est une succession de dénis », a estimé Éric Coquerel. Les commissions des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat ont relevé déjà une première entorse à la loi, avec le retard pris par le gouvernement démissionnaire, dans la communication du « tiré à part », le rapport récapitulant le montant des crédits par mission et les orientations générales du budget. Ce dernier doit être transmis avant le 15 juillet. Michel Barnier s’est engagé à communiquer une « version provisoire » d’ici la fin de la semaine.

Deuxième anomalie provoquée par la dissolution et la longue période de transition au gouvernement, l’exécutif ne sera pas en mesure de respecter le calendrier légal de dépôt du projet de loi de finances le 1er octobre. Il envisagea de le transmettre à l’Assemblée nationale le 9 octobre, soit avec 8 jours de retard.

Qualifiant l’incident de « sidérant », Éric Coquerel a annoncé son intention de récidiver avec son pouvoir de contrôle ce mercredi au ministère des Finances. « J’irai à Bercy pour les exiger et voir si Bercy a exactement la même réponse. Cette situation devient absolument insupportable et intenable. »

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