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Donald Trump a annoncé vouloir limoger le président de la réserve fédérale américaine : peut-il le faire ?

La guerre est déclarée entre le président américain Donald Trump et Jerome Powell, président de la Réserve fédérale des Etats-Unis (Fed) ou « Too Late Jerome » comme Donald Trump le surnomme. Hier, sur son réseau social TruthSocial, le président américain a violemment attaqué le président de la Fed : « Too Late Jerome aurait dû baisser les taux d’intérêt, comme l’a fait la BCE il y a longtemps ».

« Donald Trump n’a jamais pu voir Jerome Powell en photo », indique Romuald Sciora, directeur de l’Observatoire politique et géostratégique des États-Unis à l’IRIS. « C’est un conservateur modéré à l’ancienne qui n’a absolument rien à voir avec Donald Trump. Et en plus, il critique ouvertement le président américain. Cela crée un cocktail explosif parfait ». C’est pourtant le président américain qui a nommé Jerome Powell en 2017 à la tête de la Fed.

La veille de l’attaque trumpienne, Jerome Powell s’en est pris à la politique économique du président américain : « Le niveau des hausses des taxes douanières annoncées jusqu’à présent est nettement supérieur aux prévisions. Il en sera probablement de même pour les conséquences économiques, qui se traduiront notamment par une hausse de l’inflation et un ralentissement de la croissance ».

Chute boursière

Après la mise en place des droits de douane de Donald Trump, les bourses américaines ont dévissé. Depuis la mi-février, les marchés observent de nets reculs allant de 15 à 20 %. Tiraillée entre limiter l’inflation et favoriser le plein-emploi, la Fed refuse de diminuer ses taux. Ils restent stables depuis le début de l’année, entre 4,25 % et 4,50 %.

Le 4 avril dernier, Donald Trump exigeait déjà une baisse des taux d’intérêt. Hier, au cours d’une rencontre avec la présidente italienne Giorgia Meloni, il a réitéré ses propos accusant Jerome Powell de « faire le malin » et de « faire de la politique ». Il a estimé que « la fin du mandat de Powell n’arrivera jamais assez vite ». « Je veux qu’il parte, il partira vite fait, croyez-moi », a-t-il déclaré un peu plus tard dans la journée.

« Nous ne nous laisserons jamais influencer par la moindre pression politique »

Mais Donald Trump peut-il démettre Jerome Powell de ses fonctions ? Selon une jurisprudence de la Cour suprême de 1935, le renvoi nécessite un motif sérieux comme une faute grave. « Constitutionnellement, il est possible de limoger Jerome Powell, mais cela reste très compliqué », explique Romuald Sciora. « Les élus du Congrès peuvent juger que Jerome Powell a commis une faute grave, mais sans le vote des démocrates, il m’apparaît difficile que la procédure aboutisse ».

La Fed dispose d’une indépendance vis-à-vis de l’exécutif et d’une grande autonomie. Il arrive souvent que les dirigeants de la Fed s’opposent aux présidents américains sur la politique monétaire à suivre. Cependant, jamais un président de la Fed ne s’est vu être démis de ses fonctions.

« Donald Trump peut néanmoins entamer une ou des procédures longues pour tenter de limoger Jerome Powell », hypothèse le chercheur. « Ce type d’actions laisse des traces et salit une présidence. Avec l’appui des réseaux sociaux et des médias, il est possible d’entretenir un « bashing » contre Jerome Powell afin de le conduire à la démission ». Début avril, le président de la Fed a déclaré son intention de « rester en poste jusqu’à la fin de son mandat » en 2026. Il a réaffirmé hier son indépendance : « Nous ne nous laisserons jamais influencer par la moindre pression politique ».

« Qu’une attaque de plus »

Pour Romuald Sciora, cette nouvelle fronde de Donald Trump s’inscrit dans la continuité des attaques du président depuis le début de son second mandat. « Les Etats-Unis tendent de plus en plus vers un régime autoritaire avec des attaques contre le ministère de la Justice, contre des grands cabinets d’avocats, contre les universités. Avec la Fed, ça n’est qu’une attaque de plus ». Selon lui, ce second mandat se radicalise par rapport au précédent : « A l’époque, il n’y avait pas vraiment de ligne politique claire. Désormais, les choses sont dites et faites. Donald Trump s’est rapproché de la droite radicale américaine. Il y a tout un mouvement collectif autour de lui avec une bonne partie de la population qui le soutient malgré ses multiples frasques », regrette le spécialiste des Etats-Unis.

« Je pensais que d’ici deux ans, les Etats-Unis ressembleraient à la Hongrie de Viktor Orbán. Finalement, Donald Trump l’a fait en 100 jours ».

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